Oh, tiens, un artificiel paradis =)

ALICE NEEDS TO KNOW YOUR NAME

Oh, tiens, un artificiel paradis =) 2q18n85

Irina Lazareanu

LYSANDRE CORALINE JEFFERSON

dit(e) La Chenille au Narguilé.

"Toute débauche parfaite a besoin d'un parfait loisir"
Baudelaire..

ALICE WANTS YOU TO TELL HER A STORY ABOUT YOURSELF

Heureusement congédié, le malotru ! Un peu plus, et il croyait qu'il était ce qu'il n'est pas ! Ah non vraiment, son image m'était insupportable. Comment peut-on être fier quand on est nu comme un vers ? Et qu'on ne s'appelle pas Lysandre, je me comprends car évidemment, ma nudité est particulière... Mais lui, qui soudain se crut tout permis... Et le pire, dans l'affaire, le pire ! C'est qu'il avait toutes ses raisons de se prendre pour le centre de la terre ! Mais croyait-il vraiment que j'allais le reconnaître ? Oh quel mauvais joueur. Je gagne à tous les coups, l'ignorait-il donc ? Il était là, dépenaillé, pathétique, béat. M'avoir fait découvrir qu'on pouvait prendre du plaisir tout en ... prenant du plaisir. Oh je me comprends. Les plaisirs sont si vastes. Pluriels. Colorés. Parfumés. Puants, parfois. Et avec lui, je les ai associé. J'ai fumé et baisé, et ce dans un même souffle. Mon souffle va se propager à tout le jardin maintenant je le sais. Congédié, le ridicule serpentin qui m'a tendu mes champignons pendant l'amour. De lui, on n'entendra plus parler. Mais de moi ! Oh, la question ne se pose même pas.

Le pays des merveilles, j'en étais déjà l'instigatrice secrète. Ces champignons qui poussent en bas de mon arbre, je suis bien la seule à pouvoir les faire grandir. Mes produits, mes amis, mes chéris, ma vie. Ils sont multicolores, ils sont fous, encore plus déjantés que moi. D'autant que déjantée, je ne le suis pas tellement. C'est d'ailleurs ce que je lui ai expliqué, au pauvre serpentin. Absurde. Non mais vraiment les gens, je vous jure ! Quand ils sont sobres, c'est à pleurer de désespoir. Que m'a-t-il sorti, l'énergumène, ce Papou de Nouvelle-Guinée ? Je ne sais plus, il y a des choses comme ça que j'oublie. Mais l'idiot. Il croyait pouvoir me duper ! J'en rirai encore, jusqu'au bout de la nuit ! Me duper ! Alors que toutes les ruses, tous les jeux de hasard et de Fortune, je les ai appris depuis si longtemps ! Y a pas à dire, une bonne éducation, ça aide à la manipulation !

Qu'ils essaient, tous autant qu'ils sont, de prendre le pas sur moi-même. Ce sera autant de chutes admirables à observer ! S'ils savaient ! Moi-même je me dépasse, me surpasse. Eux ils trépassent ! D'accord, c'était mauvais. Quoique. Non, c'était plutôt joli. Ne me contredis pas, Alice. Tu sais bien que je suis née de ton imagination, d'une certaine manière alors si je file mon récit sans aiguilles, c'est de ta faute. Décidément, mon esprit courre plus vite que les pattes de la chenille que je suis.

Ah cet idiot, je suis sûr qu'il ne se souvient même plus de la scène ! Depuis, les champignons ont plu sur lui, les écorces farfelues et la sève d'étranges produits avec. Aujourd'hui, il doit lui être incapable de se plonger dans son passé, et je reste la seule à garder les idées claires. Ou du moins, à ne pas perdre mes rêves de vue. Ah, ils me font bien rire les petits ambitieux, les petits arrivistes malhabiles, les rois et les reines poltrons. Oh pour ça, je ne parle pas des Cartwright, eux ce sont des cas particuliers. Intriguants. J'irai bien voir à quoi elle ressemble de près madame coupez-moi-des-têtes, d'ailleurs. Il faudra que tu m'accompagnes. Où en étais-je ? Ah je ne sais plus, Alice, je ne sais plus...

Tiens, le voilà qui passe, le serpentin ramolli. Regardes donc ce sourire niais qui s'étale sur sa figure. Pour un peu il me ferait pitié. C'est un oxymore, d'une certaine manière. Ce que je veux dire ? Oh ne fais pas l'idiote. Une forme de paradoxe obscure. C'est ça, une pièce de monnaie emportée par un monde qui a sombré. Il s'est cru le maître de la chenille, et il jouit aujourd'hui à la moindre pilule que je lui procure. Ah non vraiment, les autres gens sont tellement, tellement, tellement faibles. Et si je te parlais de l'être hein ? J'y ai réfléchi ces derniers temps... Non, non je ne sais plus.

Tu as un champignon, comme la dernière fois ?

Alors montre quelque chose, chenille narguiléenne.

Ah Alice, c'est étrange. Parfois le ciel est particulièrement net, comme en ce moment. Et dans ces moments là, tu ferais mieux de fuir. Ce sont des moments intouchables. Le ciel est rayonnant, ma vision n'est pas asphyxiée. Quelques vers tirés de poèmes tous plus mystérieux les uns que les autres se balancent dans ma tête... Ils entraînent sur leurs traces des pointes de mélancolie amère. Mais non merci.

Et prestement, la chenille a filé. Agile, svelte, elle ouvre des petites boites aux motifs kaléidoscopiques, et s'empare d'une feuille étonnante, qu'elle fait rouler entre ses dents, puis avale.

Ca, je ne sais plus comment ça s'appelle, non.. De toutes manières, c'est moi qui invente tous les noms ici, j'en suis bien la seule capable. Moi j'ai la vie pour moi, alliée à toutes ces autres qualités... Oui je t'assure, tu verras au fil du temps, ma condition est réellement particulière. Oublié, le ciel net, je n'en veux pas. Je déteste la mélancolie, encore plus chez les autres. Alice, si on organisait ton non-anniversaire ?

ALICE WANTS TO KNOW THE REAL YOU